23 février 2006
par JDCh


Capitalisme: qui est le plus sauvage ?

Nous aimons adosser l'adjectif "sauvage" au substantif "capitalisme". Cette association très courante que certains considèrent comme un "pléonasme" peut très bien être considérée comme antithétique. Le capitalisme est en fait gouverné par des règles stables et strictes qui sont plutôt cohérentes avec les notions de démocratie, de liberté individuelle et de raison. Presque contre-intuitivement, les plus sauvages capitalistes sont ceux qui ne respectent pas ces règles par méconnaissance ou par rejet idéologique de celles-ci. La thèse paraît osée mais s'y essayer vaut bien un "post".

Prenons le cas de l'OPA récente lancée par Mittal Steel sur Arcelor.

L'agitation politique de nos gouvernants paraît bien inutile pour un Etat qui, après avoir largement subventionné la reconstitution d'une sidérurgie franco-européenne, avait décidé de vendre en 1997 ses actions (décision de DSK alors Minefi). L'Etat Français n'est donc pas "décideur" en la matière. On notera, d'ailleurs, que notre actuel Minefi Thierry B. , après avoir été sans doute "chauffé" par ses conseillers, a rectifié et précisé que sa réaction initiale avait été celle d'un simple "stakeholder" (par opposition à "shareholder"): il souhaite simplement avoir plus d'information.

L'information relayée par les médias français est également vaine et surtout tendancieuse. Lakshmi Mittal "capitaliste Indien, citoyen du village global" est forcément "méchant", est forcément "suspect" puisqu'il a construit un empire très rapidement, ne peut pas avoir de projet "industriel" digne du fleuron de la sidérurgie Européenne, son offre "hostile" est évidemment "irrésistible"... Foutaises.

D'abord il n'est pas impossible que la combinaison d'un acteur du "specialty steel" (ARCELOR) et du "commodity steel" (MITTAL) fasse du sens du point de vue "industriel". Les réseaux de distribution et la couverture géographique de l'entité combinée seraient en effet renforcés "de facto" (je ne connais pas ce marché mais pourquoi cette hypothèse serait-elle forcément fausse ?). Il est ensuite à peu près certain que la fusion des deux groupes complémentaires dans leur positionnement n'aurait pas, à court terme, de conséquences sur les sites de production: si Mittal veut Arcelor c'est sans doute parce que Arcelor sait produire des aciers "à valeur ajoutée" que son groupe ne sait pas produire et que seuls des investissements colossaux lui permettraient d'adresser de façon organique. Les éventuels sites menacés du groupe Arcelor (s'il en existe) le seraient sans l'OPA du "méchant" Mittal...

Ensuite si l'on regarde l'offre de Mittal, on voit que celle-ci est une offre mixte de "cash" et d'actions. Cette offre n'est pas un "no brainer" que chaque actionnaire individuel ou institutionnel va accepter "illico".

En effet, une offre en actions signifie que l'actionnaire d'Arcelor se retrouve, après une telle opération, actionnaire du groupe Mittal-Arcelor et qu'avant d'accepter, chaque actionnaire va se poser la question simple: "ai-je plus confiance dans le rendement d'un investissement dans Arcelor seul ou dans ce nouveau groupe ?". Si la logique industrielle n'est pas démontrée, les actionnaires refuseront sans doute de prendre le risque de dire "oui" à cet échange. Il est probable que Mittal souhaite "contrôler" Arcelor, il lui faut donc qu'une majorité des actionnaires de sa "cible" soit d'accord... Il n'est pas du tout sûr de les convaincre.

De plus, la composante "cash" de cette offre a plusieurs limites. La première limite est la capacité de mobilisation d'argent frais que Mittal a. Même s'il s'agit d'un "méchant", il apparaît que ses ressources sont limitées et ne lui permettent pas de faire une offre "100% cash". S'il le faisait, une seconde limite apparaîtrait: celle du prix à partir duquel une majorité d'actionnaires d'Arcelor seraient prêts à ne plus être actionnaires et à recevoir une somme "en liquide". Si ce prix était élevé voire trop élevé, le "méchant Mittal" serait en fait le "dindon de la farce". Il paierait trop cher et donc s'appauvrirait dans l'opération...

Ce petit exemple pour démontrer que les actionnaires d'une société ont "grosso modo" les mêmes droits qu'un copropriétaire, à savoir le droit de voter ainsi que le droit de vendre ou de ne pas vendre. Ce mécanisme "démocratique" est fondateur du capitalisme et je ne vois rien de "sauvage" là-dedans.

Cet exemple montre également que les règles du jeux sont auto-régulatrices: celui qui paie trop cher s'appauvrit (de même que celui qui cède pour pas cher)... Les bonnes transactions se font donc naturellement "au bon prix".

Finalement cette histoire n'a pas grand chose à voir avec l'histoire du grand méchant loup contre qui le gentil petit chaperon rouge ne peut rien faire.

Elle ressemble plutôt à l'histoire d'un club de football du Qatar qui voudrait enrôler une star du football Européen ou Sud-Américain âgée de 29 ans. Cette star à qui un salaire faramineux serait proposé devrait choisir entre "la suite de sa carrière" et un "salaire princier": sa réponse n'est pas pré-determinée et sa décision reste bien sa décision.

Pour revenir sur notre Minefi, antérieurement PDG de France Telecom, il est parfaitement au fait de tout cela. N'a-t-il pas organisé l'OPA de Wanadoo par France Telecom (en l'espèce la logique industrielle était indéniable mais on peut se poser la question du "bon prix") puis la mise sur le marché de PagesJaunes (auparavant inclus dans le groupe Wanadoo) sur une base de valorisation permettant à France Telecom d'avoir remis la main sur son fournisseur d'accès Internet pour une "bouchée de pain" ? Du grand art "capitaliste" (avec un zeste de citron franco-arnaco-je ne sais quoi)... Sauvage ? je ne sais pas, mais sûrement plus que notre ami Lakshmi...

D'aucun commenteront que le contexte était différent (France Telecom avait le contrôle de Wanadoo avant cette OPA), d'autres se rappelleront que des associations de minoritaires avaient effectivement "hurlé à la mort" (et auraient pu déclencher une "class action" si cela existait dans notre droit). Je suis, pour ma part, certain que chaque souscripteur des 2 Miliards d'Euros levés par Wanadoo en juillet 2000 en a encore un peu mal aux f...

Le week-end dernier j'ai vu à la télévision notre Premier Ministre, subtil mélange de Jeanne d'Arc et de d'Artagnan, entouré de 2 PDGs muets annoncer la fusion de Suez et d'EDF. Je n'ai à priori rien à redire sur cette fusion qui semble plutôt opportune (tant industriellement que financièrement) mais sur le fait que M. Mestrallet PDG d'une entreprise privée (Suez) soit "aux ordres", j'ai un vrai "gros" problème. M. Mestrallet a-t-il attendu de recevoir une éventuelle offre de l'Ialien Enel avant de décider d'un mariage avec GDF ? Et si cette offre avait été une belle offre pour les actionnaires de Suez ? Les actionnaires de Suez sont-ils vraiment d'accord pour être "re-nationalisés" ?...

Pour M. Cirelli, ça paraît plus normal puisque GDF est une "entreprise publique" contrôlée à 80% par l'Etat. Ceci dit, les 20% d'actionnaires que GDF a recruté lors de son entrée en Bourse (il y a peu) n'ont visiblement pas vraiment été considérés: ils devraient se déclarer heureux, on aurait pu les fusionner avec Pernod-Ricard ou Moulinex ! et puis en achetant du GDF, ils devaient savoir que leur coactionnaire majoritaire et Étatique était imprévisible !

Sans doute stratégiquement opportun mais tactiquement sauvage vis à vis des minoritaires...

Tout ceci est dit sans compter la fâcherie probable avec nos amis Italiens qui auraient voulu créer un champion Européen et nos amis Belges qui voient d'un mauvais oeil l'état Français "nationaliser" leur secteur électrique et gazier. Heureusement, tout ceci n'arrivera plus très souvent puisque l'Etat Français, et c'est une bonne nouvelle, n'a plus beaucoup d'entreprises sous son contrôle et avec qui faire "joujou" au titre de la "politique industrielle de la France".

Je ne suis pas hostile à ce concept de "patriotisme économique" mais je préfère clairement le "football total" à l"Européenne au "Catenaccio" à l'Italienne pratiqué par nos gouvernants.

Petite remarque pour en finir sur la notion d'"entreprise publique". Dans les pays anglo-saxons, "public company" signifie "entreprise cotée sur un marché boursier", cela signifie que tout à chacun (le public) peut avoir accès au capital en achetant des actions sur le marché (et cela ne signifie bien sûr pas que l'Etat est actionnaire de cette entreprise). Monsieur Mittal ne fait que tenter d'accèder au capital d'Arcelor et le statut "public" d'Arcelor le lui permet. Entrer en Bourse impose cette contrainte et ne pas avoir de "noyau dur" (groupe d'actionnaires ayant signé un pacte d'actionnaires et agissant de concert pour stabiliser le capital de l'entreprise) rend "opéable" ces "public companies".

Refuser ces règles consiste à refuser le système boursier dans son ensemble...

Je parlerai dans un autre "post" des "private companies", des fonds d'investissement en "private equity" qui investissent dans ces "private companies" et j'essayerai de vous démontrer que, malgré la réputation sulfureuse qu'aiment véhiculer les médias à leur sujet, ils ne sont ni si "nuisibles", ni si "méchants", ni si "sauvages" que cela.

Sauvagement votre...



18 février 2006
par JDCh


La libre-concurrence: une bienfaitrice méconnue

Le 29 mai dernier, les français votaient "non" au référendum concernant l'adoption de la constitution européenne. Ils devançaient de peu les "Bataves", ce qui nous a évité d'être les seuls à mettre cette nouvelle Europe des 25 dans sa situation actuelle de "non-gouvernabilité".

Quelle mouche a-t-elle piqué une majorité de Français ? Il semblerait qu'elle s'appelle "non à libre concurrence"... Il semblerait que le fait que l'Union Européenne réaffirme (dans ce que l'on pourrait appeler ses statuts associatifs) cette fameuse "libre concurrence" comme un principe réglant l'économie du grand marché Européen ait fait peur aux électeurs Français dans leur majorité.

Pourtant ces électeurs sont également tous des consommateurs, souvent des salariés des secteurs dits "concurrentiels" et doivent se féliciter tous les jours de ce principe économique particulièrement sain et efficace. Prenons 2 exemples que je connais bien: la téléphonie mobile et l'accès internet.

Aurions-nous plus de 45 millions d'abonnés au téléphone mobile si au milieu des années 90, Bouygues Telecom n'était pas arrivé sur le marché avec ses forfaits innovants ou ses offres pré-payées mettant le téléphone portable à la portée de nouveaux consommateurs de minutes "over the air" ? La réponse est non. Quand on constate les récentes condamnations de notre trio-pole pour "entente illicite", on peut légitimement penser que Itineris (ancêtre de Orange) et SFR auraient en effet probablement agi en duopole encore plus efficace, maintenu le prix des communications à un niveau assurant une forte rentabilité sur les quelques millions d'utilisateurs aisés visés à l'époque et sans doute cessé d'innover assez rapidement. L'arrivée récente des MVNOs (Mobile Virtual Network Operator - A savoir un opérateur mobile qui "sous-loue" le réseau de l'un des opérateurs existants) vont amener eux aussi leur dose de "concurrence", des offres plus économiques, des services nouveaux accessibles à plus de consommateurs... Ainsi en va l'économie d'un secteur: la concurrence en l'espèce n'a quasiment pas d'effets négatifs et recèle de plein de conséquences positives pour les utilisateurs et pour l'économie toute entière de ce segment (les distributeurs de téléphones portables "alla" Phone House, les fabricants d'accessoires divers tels que les oreillettes ou kits de voiture, les vendeurs de logos, sonneries et jeux vidéo sur mobile...). Des dizaines de milliards d'euros de "business" qui n'auraient pas existé sans "concurrence" et une croissance encore forte dans un pays où on la cherche comme on cherche des champignons durant un été sans pluie.

Sur le marché de l'Internet, rappelons-nous que France Télécom en niait encore le potentiel commercial en 1995, que quelques pionniers comme FranceNet avait converti des dizaines de milliers d'"early adopters", qu'ont suivi Club Internet puis LibertySurf avec son offre "gratuite" (on devrait dire sans abonnement car en fait les connexions en "dial up" coûtaient à l'internaute de l'époque) et plus récemment Free remarquable inventeur de ce que l'on appelle le "triple play" (accès internet, téléphonie et télévision dans la même offre). Sans les mesures de "dérégulation" de l'accès (le fameux dégroupage) organisée par l'ART (devenue ARCEP depuis), cette apparition de nouveaux acteurs n'aurait pas eu lieu, la France n'aurait pas le taux d'équipement (et le taux de croissance associé) des foyers en accès "broadband" et notre secteur internet (fournisseurs de contenus, acteurs de e-commerce, ...) serait sans doute encore au creux de la vague. Ceci sans parler des vendeurs de PC, d'imprimantes, d'appareils photos numériques, de modems ADSL,... 29,90€ par mois incluant l'accès internet, la téléphonie illimitée sur le fixe et quelques chaînes de télévision en numérique: bref l'offre la plus avantageuse du continent Européen parce que la concurrence a encore délivré ses bienfaits aux consommateurs et à un segment entier de l'économie. A nouveau des milliards de "business" et une croissance très forte pour notre économie quasiment atone par ailleurs.

Pour ne pas laisser penser que seul le secteur des technologies est "boosté" par cette libre concurrence, il est de notoriété publique que le développement économique de la ville de Marseille a été fortement favorisé par la concurrence TGV/avion apparue il y a 5 ou 6 ans. On peut de même déplorer qu'aucune compagnie aérienne française "low cost" n'ait pu se développer et favoriser le développement de certaines de nos régions ou destinations touristiques.

Un petit parallèle sportif pour finir la démonstration: la Premier League Anglaise est d'autant plus attractive et financièrement puissante que l'équipe de Chelsea "sponsorisée" par Roman Abramovitch est venu "concurrencer" Manchester, Arsenal et Liverpool. Le tournoi des 6 nations ne peut que se féliciter d'avoir accueilli il y a quelques années l'Italie maintenant capable de tenir tête au moins pendant une mi-temps à l'Angleterre. Le niveau des performances olympiques n'a fait que monter à la suite de l'arrivée des athlètes chinois. Et ainsi de suite...

Hors rappelons-nous de cette fameuse directive Bokelstein (revenue récemment sur le devant de la scène) sur la "libéralisation des services" c'est à dire ce texte visant à organiser la libre concurrence au sein de l'UE sur le marché des services. Rappelons-nous du "plombier Polonais" qui a fait voter "non" à une majorité d'entre nous. Rappelons-nous donc de ce refus des "bienfaits" de cette directive: enfin la possibilité d'appeler un plombier disponible dont les tarifs ne soient pas du "vol à main armé"!... Des bienfaits évidents pour le consommateur, des possibilités de croissance et de création de "business" dans l'Europe toute entière que notre référendum a entravé, nous les "poltrons" de l'économie libérale, les champions du conservatisme colbertisto-marxiste et... les vraisemblables perdants de demain.

Que le principe du "pays d'origine" soit maintenu ou pas dans cette fameuse directive ? En fait peu importe si l'on a confiance dans cette économie dite de marché. En effet, notre plombier slave même s'il est mal payé, mal logé pendant un temps et constitue une concurrence un peu rude pour nos plombiers tricolores, ne souhaitera pas, vous pouvez en être sûrs, que cela dure: il voudra être mieux payé, mieux logé, peut-être voudra-t-il être embauché par une société Française, voire créer sa propre entreprise en France et l'économie française aura récupéré un excellent artisan, travailleur et motivé...

Plutôt que dire "non" aux bienfaits que nous promettait la construction Européenne, il aurait fallu bien au contraire lui dire "oui", la renforcer dans son fonctionnement démocratique, dans la force politique et économique qu'elle peut constituer vis à vis des autres grandes puissantes et miser positivement sur le fait que les grands leaders du service Européen (Axa, Suez, Capgemini, Sodexho,...pour ne citer que ceux-là) auraient pu entraîner dans leurs sillages des centaines de PMEs françaises. Sans oublier de rappeler que les consommateurs y auraient plus que largement trouvé leur compte.

Les cas où la concurrence n'a pas apporté à la fois des bénéfices aux consommateurs et une croissance du secteur concerné sont rares mais existent. Il s'agit en fait des domaines dans lesquels la collectivité décide de "subventionner" un secteur pour des raisons louables d'égalité d'accès au service (typiquement de désenclavement) ou de développement durable (typiquement de protection de l'environnement). Un bon exemple serait le secteur des transports urbains (on souhaite ici à la fois qu'un banlieusard d'une cité éloignée puisse se rendre sur son lieu de travail ou tout simplement encourager les automobilistes à laisser leur véhicule au parking pour limiter la pollution). Pour un tel secteur, la question devient: quel est le coût pour la collectivité ? La réponse n'est sans doute pas dans la mise en place d'acteurs en concurrence frontale pour offrir le service à l'usager mais plutôt la mise en concurrence régulière des concessionnaires et de l'ensemble des fournisseurs de la "value chain" (les constructeurs de matériels roulants ou les sous-traitants en charge de l'entretien ou du nettoyage par exemple). Ceci ne peut que peser de façon favorable sur le coût à financer par tous. Là encore, la concurrence a ses bénéfices. CQFD.

Je finirai sur cet exemple édifiant et récent de l'Imprimerie Nationale. Détentrice du soi-disant "monopole de fabrication des passeports" et incapable de réaliser les passeports biométriques réclamés pour se rendre sans visa aux Etats-Unis, elle laisse un demi million de français dans un embarras absurde (se rendre dans un Consulat ou à l'Ambassade américaine, y faire la queue quelques heures, espérer ne pas avoir oublié une pièce nécessaire à l'obtention d'un visa et s'acquitter de la modique somme de 85€ ...). Un peu de concurrence de la part de Thales ou d'Oberthur, candidats à cette activité et déjà fournisseurs d'autres pays comme la Belgique, n'aurait pas fait de mal. Cela nous aurait évité, de surcroît, le ridicule d'être le seul des 27 pays concernés à ne pas être prêt.

Le ridicule ne tue pas...mais bon.



12 février 2006
par JDCh


Une vieille aristocrate désargentée

La France s'enorgueillit de sa Révolution fondatrice de la République (puis de l'Empire) et ayant violemment permis de tourner la page de la Monarchie. Nos aristocrates en ont bien sûr fait les frais et ceux dont la tête ne fut pas coupée et les biens non confisqués ont connus un 19eme douloureux durant lequel, ne souhaitant pas travailler (ils ne l'avaient jamais fait), ils ont subsisté en vendant année après année leur patrimoine foncier et immobilier et en réduisant leur train de vie...

Cette histoire me rappelle la France d'aujourd'hui. Elle se refuse à travailler autant que les autres et elle vend... Nos paysans vendent des fermettes à des Anglais, nos start-ups technologiques sont rachetées par les Américains, nos PMEs familiales font l'objet de "buy-out" par des fonds d'investissement "backés" par les fonds de pension anglo-saxons, nos sociétés cotées sont détenues pour une bonne part par ces mêmes investisseurs internationaux et notre État vend chaque année quelques sociétés du secteur public (énergie, autoroute...).

Le fait de réaliser des cessions est en soit une excellent chose si cela se fait dans une situation d'arbitrage entre ce que l'on cède et ce que l'on décide d'acquérir, si l'on transforme une propriété à faible rendement en un investissement plus prometteur, en bref si l'on gère son patrimoine afin de le faire prospérer. Ce n'est malheureusement pas notre cas...

Si l'on se penche sur la France, son État et le patrimoine de ses habitants et entreprises, on s'aperçoit de 2 choses: un, ce patrimoine reste encore important et attractif pour des investisseurs domestiques ou internationaux ; deux, ce patrimoine fond "au soleil" car nous le cédons simplement pour subvenir à nos "besoins de fonctionnement". A part quelques multinationales d'origine française (Saint Gobain, LVMH, Renault, Total, Lafarge...), entend-on parler d'investissement français dans les 10 nouveaux pays d'Europe, dans les super-puissantes émergentes que sont l'Inde et la Chine ou dans de nouvelles classes d'actifs à fort rendement ? La réponse est désespérément "non" (ou de façon bien trop modeste).

Notre système de retraite par répartition nous interdit d'avoir cette puissance de frappe (les fameux fonds de pension) dont les anglo-saxons se sont dotés. Nos PMEs trop petites ne maîtrisent pas leur "dé-localisation" comme le font celles du "Mittelstand" allemand en Pologne, Tchequie ou Hongrie. Nous n'avons que fort peu d'histoires à raconter comparables à celle des Suédois H&M ou Tele2, du Britannique Easyjet, de l'Espagnol Zara et bien sûr des Américains Cisco, Google and co. Par ailleurs, les rares particuliers français qui investissent à l'étranger le font souvent pour des raisons d'évasion fiscale...

Nous vendons pour "fonctionner", pour faire durer un modèle suite à la Révolution que constitue la Mondialisation. Un petit calcul simple montre que nous pouvons tous arrêter de travailler, tout vendre et tenir encore quelques années (le patrimoine des français résidents en France est d'un peu plus de 100.000 € par tête de pipe), mais après nada... !

J'entendais récemment sur BFM (une radio que j'aime bien) un intervenant dire "ces raisonnements par tête ne veulent rien dire, un état c'est différent ça ne peut pas faire faillite". Chiche !

En effet, tirés vers le bas par nos dépenses publiques (54% du PIB !) et la dette abyssale creusée depuis 30 ans (il faudrait vendre immédiatement plus d'un quart de notre patrimoine à tous pour la rembourser !), la réaction que nous devrions avoir pour inverser la tendance devrait être absolument drastique....

L'Histoire est ainsi faite qu'elle se reproduit cycliquement en prenant une forme différente. Les règles du jeu économique mondial ont changé, notre résistance collective à ce changement est totalement vaine, notre attachement à des modèles ou valeurs du siècle dernier peut servir de tremplin mais pas de refuge et il est grand temps que la Vérité devienne la base de nos critères de décision.

Le seul programme économique fondé sur la Vérité est simple à énoncer:

- les prélèvements obligatoires (impôts, taxes et cotisations sociales) sont évidemment beaucoup trop importants. Considérer la moindre hausse ou création de prélèvement nouveau est une aberration (quand je repense aux voeux pathétiques de notre [pathétique] Président et sa fameuse taxe sur la valeur ajoutée...). La tendance durable, garantie et maîtrisée doit être à la baisse. Il faut donner aux décideurs économiques la "lisibilité dans la durée": ils l'attendent depuis maintenant 30 ans.

- le coût de fonctionnement de l'Etat, du Secteur Public et des Collectivités Territoriales est également évidemment beaucoup trop important. Il faut arrêter d'avoir un Ministère (même délégué) aux Anciens Combattants, de construire des rond-points, de subventionner abusivement le spectacle vivant et ses intermittents, de rembourser les cures pyrénéennes, d'avoir des systèmes de retraites spéciaux dont les raisons sont révolues depuis belle lurette, d'avoir 5 niveaux administratifs (commune, communauté urbaine, département, région et national), de considérer la politique agricole comme "intouchable", de laisser prospérer une armée de contrôleurs et d'inspecteurs dont la mission n'a jamais fait l'objet de la moindre analyse de la valeur (combien ça coûte ? combien ça rapporte ?)... Je pourrais en lister des giga-octets !

Tout ceci paraît évident à beaucoup et très certainement à une majorité (silencieuse) de nos compatriotes. Pourquoi cette stratégie de la Vérité n'est-elle pas celle de nos politiques ? Pourquoi ne voterions-nous pas pour ceux qui se l'approprieraient ? (Ceux qui croient que ceci est un appel au vote pour Nicolas S. se trompent... mon niveau de confiance dans ce dynamique acteur médiatique est plutôt bas). Pourquoi ne pas retenir comme unique thème de campagne présidentielle la "réussite économique" et ce, sans tabou: création de richesses comme objectif numéro 1 assortie d'une baisse continue de nos dépenses collectives comme condition numéro 1 ?

Pour finir comme d'habitude par une comparaison sportive et pour que tous ceux qui me classeraient dans le clan des "déclinologues" ne le fassent pas: dans les années 70, quand j'étais petit, nous perdions quasiment toujours, nos espoirs étaient toujours déçus, nos champions (sauf quelques très rares exceptions) passaient toujours à côté le jour J. Ceci n'est plus vrai...

Nos champions ont gagné la Coupe du Monde de football, la Coupe Davis, le Championnat du Monde de Handball ou du 4x100 m plat masculin et féminin, des médailles d'or olympiques en ski et en judo... L'élite du sport français s'est mobilisée, a pris confiance, n'a plus eu peur d'afficher ses ambitions, a accepté les règles, pratiques et recettes venant du monde entier, a bossé dur en rêvant de victoire, a raisonné dans une logique exigeante d'excellence et... a fini par gagner.

Tout ceci n'a bien évidemment pas nui au "sport pour tous". Bien au contraire.

C'est faisable. Y'a plus qu'à...



10 février 2006
par JDCh


Une éternelle nostalgie "trotskiste"

Je crois que je me souviendrai longtemps d'une émission un dimanche soir pendant laquelle Arlette L. égérie increvable du trotskisme français s'était exclamé à propos de la faillite d'AOM-Air Liberté et du baron E.A.S. "Toujours plus de profits pour le grand capital ! ". Ceci avait étonné ma logique mathématique. La holding d'investissement de la famille du baron ne venait-elle pas de perdre plus de 300 millions de francs du fait, notamment, des problèmes lourds rencontrés par son coactionnaire industriel SwissAir ? Ce qui m'avait en fait le plus étonné était l'absolue non-réaction des journalistes de renom animant cette émission à qui il n'était même venu à l'idée de corriger des propos aussi paradoxaux. Profits ou pertes tant que cela affecte les riches, les entreprises, l'état, c'est finalement un peu la même chose !

"Prenons aux riches et tout le monde sera moins pauvre" est une phrase pour laquelle la France entière (ou presque) a une certaine "sympathie" (moi y compris). Ce "slogan" est cependant faux à 3 titres. D'abord et bien sûr, faux pour les riches à qui on prend. Faux ensuite parce l'enthousiasme et l'énergie mis par les uns et les autres dans la création de richesse baissent immédiatement (il y a donc moins à partager). Faux enfin parce que le coût de gestion de la redistribution devient vite prohibitif et finit d'appauvrir l'ensemble (le fameux coût de gestion de l'état "providence").

Si je me risquais une nouvelle fois à une comparaison sportive et en poussant le raisonnement à l'extrême; Tout se passe comme s'il était décidé que les ramasseurs de balle devaient gagner autant que Federer ou Mauresmo. Ces derniers n'auraient plus envie de s'entraîner tous les jours ( ils préféreraient sans doute devenir eux-mêmes ramasseurs de balle !). Les ramasseurs n'auraient plus le rêve d'égaler les champions et l'économie du tennis s'effondrerait assez rapidement entraînée dans sa chute par le coût de la FFT devenue absurde.

La France, malgré l'évidence de la faillite des économies communistes, garde cette nostalgie "toxique" que le trotskisme était une bonne idée qu'il suffirait de ré-inventer. L'héritage est bien transmis et, par exemple, une bonne partie des systèmes sociaux étudiants est gérée de génération en génération par une frange activiste, très à l'aise dans la dialectique du débat avec autrui et capable de mobiliser la "sympathie" de ses conscrits.

Ils étaient d'ailleurs dans la rue cette semaine manifestant contre le CPE (il me semble d'ailleurs avoir aperçu une bannière réclamant emploi à vie et treizième mois pour les ramasseurs de Roland Garros !). Quelques centaines de milliers d'étudiant défilant par sympathie pour une utopie que l'histoire a pourtant démasquée.

Ce CPE me parait, à moi, une bonne mesure pour deux raisons.

La première, c'est une mesure simple de portée générale: ceci est tellement rare en France (nous ne sommes cependant pas l'abri que les conseillers technocrates de nos ministres sous la pression de la rue n'y ajoutent les 3 ou 4 critères la rendant inapplicable ou "illisible" comme dit Anne P). Combien de mesures en faveur des petites et moyennes entreprises n'ont eu aucun effet parce qu'il fallait d'abord créer un service juridique et fiscal interne à l'entreprise avant de pouvoir en comprendre l'applicabilité ?

La seconde raison est que certains parlent d'"effet d'aubaine" comme si cela était un drame. Qu'un décideur économique considère comme une "aubaine" d'embaucher un jeune me parait plus qu'encourageant et même si certains effets indésirables devaient apparaître, ma confiance dans l'économie de marché me me laisse aucun doute sur le fait que la résultante serait positive. Ceux qui diabolisent le CPE sont les mêmes qui refuseraient de soigner une maladie grave voire mortelle parce que les médicaments prescrits risqueraient d'entraîner des problèmes de chute de cheveux ou de fertilité !

En réalité, le plus grave dans cette affaire du CPE, c'est la politisation extrême que va prendre ce débat sur une mesure économique. La gauche qui ne peut être majoritaire sans intégrer une armée d'anciens trotskistes mal soignés dans ses rangs pousse des cris d'orfraie. Elle envoie devant les micros et les caméras ses amazones les plus incultes économiquement (suivez mon regard...) tandis que les éléphants qui "ne peuvent pas ne pas savoir" se cachent pour ne pas avoir à dire de trop grosses contre-vérités devant ces mêmes médias...

Conclusion de tout cela: le petit patron qui commençait à envisager la création d'un emploi via ce CPE est en train de se raviser car tout ceci sera vraisemblablement remis en cause mi-2007. "La transformation du CPE en contrat à vie étant une mesure "sympathique", pourquoi ne pas la mettre à notre programme ?", se disent nos nostalgiques utopistes.

Au secours ...!



04 février 2006
par JDCh


Pas d'équipe de France du Business

Dans un pays où le Président, le Premier Ministre et la grande majorité des ministres ont toujours été soit fonctionnaires, soit élus, l'inculture économique de la population est finalement toute relative par rapport à celle de sa soi-disant élite.

L'objet de ce "blog" est de parler avec des mots simples, des comparaisons didactiques et des raisonnements non politisés de ce que certains diabolisent sous le terme d'économie globale. On espère ici recueillir réactions voire adhésions sur des changements profonds de mentalité, de comportements et de gouvernance de notre "cher pays".

Une comparaison avec le sport de haut niveau pourrait donner à ce message une lisibilité comparable à celle de l'Equipe ou de France Football. Essayons...

Zidane et Thierry Henry ne jouent pas en France. L'arrêt Bosman permet au Real de Madrid ou a Arsenal de jouer presque sans Espagnols ou Britanniques. Les 2 meilleurs joueurs français ne jouent pas en France. Puisqu'il y a une équipe de France de football, nous considérons tous que ceci n'est pas si grave à condition que la France se qualifie pour la Coupe du Monde ou l'Euro (et y figure honorablement...).

Dans le monde des affaires, les choses en vont bien autrement. La petite douzaine de fantastiques entrepreneurs français que je connais et qui ont réussi dans la "technologie" vivent aujourd'hui à Londres, Bruxelles, Genève, New-York ou San Francisco. Pourquoi ? Parce que ces locomotives ont gagné à un moment suffisamment d'argent pour arbitrer entre vivre en France, proches de leurs familles et de leurs amis et subir le tracas du fisc et notamment de l'ISF. Ces entrepreneurs ne sont pas sélectionnés en équipe de France du business puisqu'il n'y en a pas et leurs prochaines aventures en tant qu'entrepreneurs ou "business angels" se feront sans doute hors de France. Zidane et Thierry Henry reviendront-ils en France une fois leur carrière terminée ? Probablement pas mais ceci est beaucoup moins grave...

La FIFA énonce les règles du football. Elle ne les change d'ailleurs pas très souvent et à part quelques expérimentations dans certains tournois (arbitrage vidéo, remplacement temporaire...), la planète entière considère les lois du football comme acceptables et acceptées. La France, son équipe nationale et ses clubs (du club de district à l'élite) acceptent d'être arbitrés suivant ces règles.

En matière d'économie, nos hommes et femmes politiques ont la naïveté de penser qu'il pourrait en être autrement. Un exemple ? les 35 heures. Décision unilatérale, théorique et folle d'un de nos gouvernements de la fin du 20eme siècle... Exactement comme si le Président de la FFF ou de la LNF décidait que la règle du "hors-jeu" ne s'appliquait pas en France (en prétendant que comme cela il y aura plus de buts !)... Notre championnat serait peut-être attrayant mais quid des performances de nos clubs qualifiés en Champion League avec leurs avant-centres résidant dans les 6 mètres et sifflés par l'arbitre à chaque action de jeu... Là il deviendra nécessaire d'avoir une équipe de France composée uniquement de joueurs évoluant à l'étranger !

La suite au prochain épisode.