01 novembre 2007
par JDCh


Pouvoir d'achat: le "catch 22"

Je suis toujours effaré de voir comment les différents débats autour du pouvoir d'achat sont totalement théoriques dans notre cher pays. Les idées autour du "travailler plus pour gagner plus" ou d'une réforme de la loi Galland favorisant la concurrence sont, certes, fondées sur une volonté logique d'augmenter le nombre d'euros disponibles dans le porte-monnaie de notre compatriote ou de lui permettre, avec le même nombre d'euros, d'acheter moins cher certains produits mais... le "catch 22" qui sous tend toutes ces initiatives n'est jamais mis sur la table... Quel est-il ?

Partons concrètement d'un foyer Français gagnant net 3600 euros par mois (2 salaires modestes). Le coût pour leurs employeurs est de 6000 euros par mois en incluant les charges dites salariales et patronales. Ces 6000 euros sont "dépensés" comme suit:
  • 2000 euros de charges patronales
  • 400 euros de charges salariales
  • 1200 euros pour se loger (loyer, EDF,...) dont 100 euros de taxes diverses (taxe sur les loyers, TVA...)
  • 300 euros d'impôts directs (IRPP, taxe d'habitation...)
  • 400 euros pour la voiture (achat amorti, assurances, essence..) dont sans doute 100 euros de taxes diverses (taxe sur les assurances, TIPP...)
  • 1700 euros de dépenses courantes (alimentaire, loisirs, téléphone/internet/TV, vêtements...) dont environ 300 euros de taxes (TVA principalement).

Si l'on fait un bilan de l'utilisation de ces 6000 euros: 2400 partent en charges sociales (40%) et 800 en impôts et taxes divers (13%) ce qui permet de retrouver notre fameux taux de prélèvements obligatoires supérieur à 50%.

Si maintenant on exclue les dépenses liées au logement qui pèsent un tiers du net disponible, il reste seulement 1400 euros nets de taxes et impôts consacrés aux dépenses courantes. Or ces 1400 euros servent pour plus de 50% à financer des salaires eux-mêmes soumis à plus de 50% de prélèvements obligatoires. Et sur les 350 euros disponibles au sein de ces 1400 euros pour payer des salaires nets, près de 120 seront consacrés au logement des salariés participant à la fabrication et la distribution des produits et services consommés par notre foyer-type....

Sur les 6000 euros initialement engagés, 230 euros environ permettent aux "salariés-fournisseurs" de consommer ! Vertigineux, non ?

Le "catch 22 " est là: nous serions ravis d'augmenter le pouvoir d'achat de notre foyer-type mais celui-ci ne serait effectivement amélioré que si l'on n'augmentait pas les salaires des "pauvres salariés fournisseurs" qui doivent se partager les 230 euros nets effectivement disponibles pour eux-mêmes consommer !

D'aucuns ne manqueront pas d'arguer à juste titre que les 3200 euros "partis" sous forme de charges sociales, taxes et impôts représentent, pour partie, un "pouvoir d'achat" ce qui est vrai pour ce qui concerne l'éducation et la santé notamment (en l'occurence, on parlerait ici de façon plus approprié de "pouvoir de dépenses") mais personne n'osera, je l'espère, affirmer qu'une économie telle que je la décris sans caricature est "viable" !

Le problème du pouvoir d'achat des "salariés consommateurs" n'est pas de faire baisser les prix ce qui met sous pression le pouvoir d'achat des "salariés fournisseurs" mais d'augmenter la part effectivement disponible dans le porte-monnaie du salarié qu'il soit consommateur ou fournisseur. Ceci veut dire baisse du niveau des prélèvements obligatoires et rien d'autre !

L'idée de la TVA sociale est marginalement bonne dans l'équation qu'il nous faut résoudre mais il s'agit, pour une très bonne part, d'une supercherie: on taxerait un peu plus les 1400 euros de dépenses courantes hors taxes et notamment la petite partie de cette somme correspondant à des produits importés (en étant généreux 350 euros). Un point de TVA sociale c'est donc moins de 3,5 euros "déplaçables" sur un total de 6000 euros engagés (soit 0,06%). Une misère... qui va pourtant occuper nos politiciens et journalistes dans les mois qui viennent ! Que cela est vain !

Quand commencera-t-on à dire aux Français les choses telles qu'elle sont ?



4 Comments:

At 2:32 PM, novembre 01, 2007, Anonymous Anonyme a dit...

je suis votre blog depuis un certain temps, m'étant expatrié en espagne depuis 5 ans environs.

j'y retrouve une "explication" de la politique que sont loins de donner les medias (faisant la part de subjectivitée qui s'impose)

comme la plupart des "jeunes" de ma generation (1979 que vous apellez la génération perdue si je ne m'abuse)je suis totalement désillusionné face a la politique.

cette meme politique qui nous parle d'une inflation "controlée" a 3% depuis plus de 10 ans ... (environ 35% donc) quand les salaires sont loins d'avoir suivis une telle croissance (a part peut etre dans l'administrations ...)

en espagne je suis gerant d'un restaurant, avec environ 10 employés, je touche ce que vous apellez un salaire "modeste" oO (et dire que je ne m'en plaint pas)

soit 1800 net
je coute environ 400 € a l'entreprise en sécuritées sociale etc ... pour un salaire déclaré de 1500 brut
le loyer moyen (45 min de barcelone) est d'environ 500 €, plus les charges environ 300 €, comptons un petit vehicule 200 € / mois
il me reste donc environ 800 € par mois net

je comprend mieux les jeunes qui viennent s'installer ici, et je ne comprend pas que l'on veuille encore "creér" des entreprises en france.

meme si il est vrai que dans la restauration les horaires sont loins de ceux de nos trés chers fonctionnaires.

amicalement julien

 
At 10:15 PM, novembre 01, 2007, Anonymous Anonyme a dit...

Toujours aussi mordant, JD ! Tu as bien raison, nos gouvernants sont... "marginalement" pertinents !

"l'idée de la TVA sociale est marginalement bonne": marginalement est bien le mot qui convient. car franchement, taxer la VA en amont de son voyage dans les flux financiers de l'entreprise (TVA) ou en aval (charges sur les salaires) ne change pas la face du monde.

La seule issue, pour réduire les prélèvements, est de réduire les dépenses, et donc de réduire les charges SANS AUGMENTER LE MOINDRE IMPOT en corollaire. Voila pourquoi je me bats contre l'idée de TVA sociale. Non qu'il soit mauvais de vouloir transférer ce qui relève de la solidarité sur l'impôt plutôt que sur les charges, mais par pitié, ne le finançons pas par un autre impôt, mais par la baisse des dépenses.

 
At 10:46 AM, novembre 02, 2007, Blogger Silvere Tajan a dit...

> un foyer Français gagnant net 3600
> euros par mois (2 salaires
> modestes).

3600 euros net par mois, ce n'est pas deux salaires modestes. Le salaire median net des francais 1484 € (insee 2004). 3600 € c'est 20% de plus que deux salaires medians. La grande majorité des francais ne gagnent pas cela.

Mais sinon, oui vous avez raison, le coeur du probleme n'est pas celui du pouvoir d'achat, mais celui de la part du salaire intégral (ce que le salarié coute directement à l'entreprise en salaire et charge) sur laquelle le salarié est libre de consommer comme il l'entend sur un marché libre. La très grosse majorité de son salaire est dépensé comme la communauté (via le gouvernement etc..) a décidé pour lui, et non comme lui l'a décidé en fonction de ses propres priorités et choix. La majeure partie échappe donc au marché. Est on d'ailleurs encore dans une économie de marché quand la part des revenus utilisables librement sur un marché libre est minoritaire ??

Enfin, il convient d'ajouter a votre démonstration que pour baisser les charges OBLIGATOIRES il est nécessaire de baisser d'autant les prestations auxquelles elles donnent droit. Chacun sera libre de redépenser les memes sommes dans les memes prestations s'il le désire, évidemment.

Une des clefs de la réforme passe ainsi à mon sens par l'avénement du revenu intégral, et ce en deux étapes :

1 - il faut que les entreprises versent 100% du salaires a leurs employés (6000 € pour le couple dans votre exemple). Et que les employés payent eux memes toutes ces charges, et pas par prélèvement automatique a la source sur le salaire : il faut que l'argent transite par leur compte. C'est le leur, ils l'ont gagné. Ils sont peut etre obligé d'en reverser une (grosse) partie à l'état et autres partenaires sociaux, mais c'est a eux de le faire. C'est l'étape 1 : l'étape de transparence, ou chacun saura exactement ce qu'il gagne réellement, et ce qui lui est prélevé de manière obligatoire.

2 - Dans un second temps, il est alors plus facile d'ouvrir a la concurrence certains de ces versements obligatoires, libre au salarié de choisir à quel organisme, et donc a quel prix et pour quelles prestations (quitte a fixer des prestations obligatoire minimum, comme l'assurance au tiers obligatoire pour la voiture) il CHOISIT de faire confiance.

Mais dès lors que l'étape 1 est acquise, faites confiances aux francais pour réclamer d'eux meme une plus grande latitude de choix dans la gestion de cet argent qu'il a gagné. Et tous ceux qui refusent de passer a l'étape 1, qui ne change rien sur les finances de qui que ce soit, mais permet la transparence, sont des hypocrites qui admettent que seul la tromperie, le secret et la manipulation permet d'asseoir sur les individus un aussi grand niveau de controle et de pouvoir.

L'étatisme se nourrit du mensonge et de la dissumulation. Imposez la transparence, et le grand public ne se satisfera plus de cette omniprésence étatique qu'il ne tolère et croit appeler de ses voeux que parce qu'on lui en cache l'étendue.

Le combat pour la réforme doit avant tout etre celui de la transparence, et ce blog y contribue.

 
At 4:16 PM, janvier 16, 2008, Anonymous Anonyme a dit...

Si votre démonstration apporte effectivement un savoir dont les français tireront le plus grand profit, toutefois la conclusion laisse un goût amer, d’inachevé. Rien d'autre qu’une Baisse du niveau des prélèvements et l’histoire s’arrête là ? La cata économico-sociale qui s’en suit, on en fait quoi ?

Je n’aime pas les histoires qui finissent mal. Avec votre permission je vais la réécrire cette fin.

Le problème du pouvoir d'achat des "salariés consommateurs" est non seulement

de faire baisser les prix sans mettre sous pression le pouvoir d'achat des "salariés fournisseurs" afin d'augmenter la part effectivement disponible dans le porte-monnaie du salarié qu'il soit consommateur ou fournisseur

-En éradiquant les faux frais, et en particulier financier qui intervient pour un minimum 51% (somme de la chaîne des crédits bancaires utilisés à la fabrication et la commercialisation d’un produit ou service) du prix de vente d’un produit fini.

Mais aussi, baisser le niveau des prélèvements obligatoires par la suppression de certains.

-En éradiquant le déficit social (endettement en interne - retenu prestataires à la source mini déficitx2 /revenu différé à avantages fiscaux substantiels - associé à une politique volontariste de création d’entreprises, financée par le solde de la retenue à la source, pour le retour au plein emploi. Recette additionnelle supérieure au déficit social, équivalente au déficit budgétaire). Son corollaire, la suppression des cotisations chômage entre autre et augmentation du pouvoir d’achat par réattribution à l’identique au profit du salarié de l’entreprise des sommes dégagées.

-En éradiquant le déficit budgétaire (utilisation recette additionnelle, suppression par mutation de la charge de la dette

-En éradiquant la dette de la France, mutation dette en investissement perpétuelle

Je ne sais pas pourquoi je préfère les fins heureuses. Certes les 3 derniers points demandent à être explicités, mais savoir que cela est aisément réalisable dans l’année, pour les 2 premiers, est plutôt réjouissant, pour le pouvoir d’achat, il va s’en dire, n’est ce pas. Qu’en dites vous ?

amicalement Maissi Ya.K.

 

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