L'irrésistible ascension de Calibayrou
Une chose apparaît maintenant comme presque évidente: si Calibayrou est au second tour, il sera Président de la République. En effet...
- dans l'effrayante hypothèse où il se retrouverait contre Le Pen, le plébiscite "républicain" qui nous a valu 5 années de "Chiraquaneries" se reproduirait;
- s'il devait affronter Démagolène, la France de droite qui est majoritaire (selon les sondages) le choisirait pour "éviter le pire" et le retour au socialo-communisme;
- plus intéressant, face à Sarkoléon, sa victoire serait due à une mobilisation de la gauche et des indécis à qui Sarkosix "fait peur" avec sa "rupture même tranquille".
Calibayrou, pour ce retrouver dans cette enviable position a, pour l'instant, très bien joué ses cartes:
- victime boudée par les média, bousculant Claire Chazal en fin d'année dernière, il fait maintenant la une des magazines grands publics tel Robert Redford chuchotant à l'oreille des chevaux, forme moderne de Henri IV sur son cheval... alezan...
- surfant sur la faible crédibilité des deux "partis de pouvoir", l'UMP et le PS, il ringardise le débat bipolaire et évite toute surenchère dans ses peu nombreuses propositions...
- faisant miroiter le fantasme du gouvernement d'Union Nationale où "les hommes et les femmes de bonne volonté" -"les meilleurs de gauche comme de droite"- se réuniraient dans un même projet "bon pour le pays", il crée l'illusion que les choses pourraient changer sans proposer la moindre rupture...
Je suis allé à la pêche sur Internet pour savoir à quelle sauce (béarnaise) notre ami souhaiter assaisonner la France s'il était l'Elu. L'essentiel se trouve derrière ce lien sachant qu'un livre est attendu dans quelques jours pour parachever sans doute cette construction fragile entre le rien et le peu, entre le raisonnable et le démagogique ou entre la sociale-démocratie et la démocratie chrétienne.
Funambule dans son positionnement, Calibayrou porte un avis plutôt qu'il ne propose d'agir. Petite revue très personnelle des thèmes abordés...
- provincial, élu local de longue date, il prône décentralisation et regroupement des conseils régionaux et généraux ce qui va dans le bon sens. Prudent et ancien ministre impuissant de l'Education Nationale, il exclue celle-ci de toute forme de régionalisation... Faut pas fâcher Aschieri et ses amis...
- agrégé de lettres mais pas énarque, il annonce vouloir changer la "nature de l'ENA". Début intéressant même si l'on reste sur sa faim...
- en bon père de famille, il appelle à des gains de productivité de l'Etat de 2% par an, fustigeant pudiquement les fonctionnaires des impôts mais se gardant bien d'être plus précis. En bon gestionnaire, il propose de réduire le déficit et la dette sans proposer la moindre baisse d'impôt. C'est logique mais ça "dynamise" pas vraiment...
- ratissant à gauche, il appelle à une re-nationalisation et fusion de EDF-GDF. Il a raison de dire que ces pseudo-privatisations où l'Etat reste actionnaire de contrôle ou de blocage sont bâtardes. Il ne croit visiblement pas à la dérégulation et à la mise en place d'un marché concurrentiel de l'énergie...
- rameutant toujours sur sa gauche, il dénonce les abus commis par les grandes sociétés de l'audiovisuel pour expliquer le déficit abyssal du régime des intermittents du spectacle. Un peu court comme explication...
- européen convaincu -et il faut lui rendre hommage d'être resté fidèle à cette "grande idée"-, il propose de re-soumettre à référendum un traité de constitution européenne plus digeste. Là, il prend des risques mesurés puisque Sarkoléon et Démagolène sont sur des positions similaires...
- aussi couard que Sarkosix, il ne propose pas de supprimer l'ISF mais de le remplacer par un impôt sur le patrimoine à taux fixe (1 pour 1000) sans niche fiscale. On comprend qu'il ne veuille plus de l'exemption Fabiusienne des oeuvres d'art mais pense-t-il sérieusement ré-incorporer l'outil de travail sans provoquer l'exode des sièges sociaux et des dirigeants-actionnaires et la fureur des petits patrons ?
- courageux mais pas téméraire puisque les sondages confirment l'adhésion majoritaire des Français, il annonce une refonte des régimes de retraites y compris des régimes spéciaux. C'est bien...
- dans les pas de Sarkosix, esquivant toute remise en cause des 35 heures, il propose une exonération de charges sociales pour les heures supplémentaires tout en prônant une rémunération majorée de 35% pour les salariés. Sûrement assez populaire mais lourdement inefficace...
- enfin, sa proposition de 2 emplois-francs par entreprise est sans doute la plus originale et la plus prometteuse. Bien que difficile à appliquer (qui est le n+unième salarié d'une entreprise qui à la fois voit partir et embauche des collaborateurs au cours d'un exercice ?), elle ouvre une voie nouvelle qui serait celle d'un "discount" sur les charges sociales pour les entreprises qui augmentent leurs effectifs (ou leur masse salariale). Bien instrumentée, appliquée aussi bien aux entreprises indépendantes qu'aux groupes consolidés, on pourrait derrière cette idée faire atterrir progressivement le niveau moyen des charges sociales à un niveau moins castrateur économiquement. Avec un peu de chance, cette mesure réduirait sans doute nos déficits sociaux si elle correspondait à une période de création nette d'emplois...
En conclusion, Calibayrou est au Caprice des Dieux ce que Sarkoléon est au Camembert...
Raisonnable, pondéré, quasi-immobile dans une posture de négation plus que d'affirmation, notre ami, moins ridicule que sa marionnette des guignols, dit peu de bêtises mais n'est franchement pas le "leader du sursaut" dont notre pays a besoin. Sans doute les Français n'aiment-ils pas sursauter et préfèrent-ils continuer leur paisible déclin somnolent !
Ceci dit, c'est toujours mieux qu'une "vache qui sourit trop" !
3 Comments:
Ségolène est molle et ses mesures visent plus à assister la population qu'à la bouster. Sorkozy croit tout savoir sur tout, ses mesures basés sur des valeurs morales 'travail, famille, patrie' font peur. Bayrou lui, fait un constat de la France sans faire de promesses extraordinaires qu'il ne pourra pas tenir par manque de moyen ou de faisabilité. Quant aux deux autres candidats qui ont réponse à tout ( impôts, salaires , délocalisations, chômage, pouvoir d'achat, logements …) passent à présent pour de faux ambitieux, car où trouveront-ils l'énergie et l'argent pour tout résoudre en 5 ans ? Bayrou peut paraître mou, peu ambitieux, voir résigné, mais il inspire confiance aux jeunes et attire les indécis. Par ailleurs, Ségolène Royale étant un boulet pour sont propre parti et pour beaucoup de citoyens de gauche, je ne m'étonnerai pas qu'un grand nombre de l'électorat socialiste opte pour Bayrou devant les urnes. De plus, les gens ont vraiment l'impression d'avoir été manipulé par les médias qui ont surmédiatisé Sarko et imposé Ségolène à la présidentiel. Car avant que les médias ne nous bassine avec Ségolène, rappelons que personne ne l'imaginait candidate et que même lorsque les rumeurs ont couru, peu croyait à sa crédibilité. Sa médiatisation soudaine l'a imposée comme candidate potentiellement crédible aux membres du parti socialiste avant de devenir la candidate légitimement élue par les adhérents. Les francais ont donc été longtemps coincé entre Ségo et Sarko, Bayrou surgit de nulle de part, voilà qui tranche ! Ni à droite, ni à gauche, bien que ? Bayrou à dit qu'il prendrait un premier ministre de gauche, ça rassure les socialiste, mais qui sait, peut-être n'est qu'une stratégie pour piquer les élécteurs d'un parti qui 'supporte' une candidate au lieu de la soutenir...
Sans compter l'argument de choc repris par la Figaro :
Bayrou, "seul candidat capable de traire une vache". Il faut le dire : Les jeux sont faits, Bayrou sera président, comme prédit par tonton en guise de coup de pied de l'âne. A défaut de redresser le pays, ou pas, on va bien s'amuser pendant les législatives :)
"construction fragile entre le rien et le peu"
Mmmh, miam, j'aime :).
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